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Les concessions à perpétuité discrètement récupérées
Cahors, à l'ombre des remparts médiévaux, les vieux morts doivent laisser la place aux jeunes...
Un sujet difficile à aborder...
Je ne serai jamais mort. Car le je n'existera plus dès que j'aurais cessé de vivre. Lexpérience de la mort est invivable. Alors ?
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Jésus et un panneau d'information à Cahors |
Régulièrement, j'essaye de me convaincre, en ressassant un passage de la Lettre à Ménécée d'Epicure, "la mort nest rien pour nous, puisque tout bien et tout mal résident dans la sensation, or la mort est léradication de nos sensations. Quand nous sommes, la mort nest pas là, et quand la mort est là, cest nous qui ne sommes pas." Mon tantra.
La vie sarrête un jour. Ma vie sarrêtera un jour. Ce drame, j'ai des difficultés à me le représenter, personnellement. Langoisse existentielle. La mort des autres est si fréquente que je ne peux plus me bercer d'illusions. Certes, certains continuent à croire en un Dieu. Le résumé de Michel Onfray, dans son "Traité dathéologie", me semble correct : "Pour conjurer la mort, lhomo sapiens la congédie. Afin déviter davoir à résoudre le problème, il le supprime. Avoir à mourir ne concerne que les mortels : le croyant, lui, naïf et niais, sait quil est immortel, quil survivra à lhécatombe planétaire (...) Tant que les hommes auront à mourir, une partie dentre eux ne pourra soutenir cette idée et inventera des subterfuges. (...) Je suis mortel ? Dieu est immortel ; je suis fini ? Dieu est infini ; je suis limité ? Dieu est illimité ; je ne sais pas tout ? Dieu est omniscient ; je suis créé ? Dieu est incréé ; je suis faible ? Dieu incarne la Toute-Puissance ; je suis sur terre ? Dieu est au ciel ; je suis imparfait ? Dieu est parfait ; je ne suis rien ? Dieu est tout...
Pour se rassurer autrement : les morts montrent la voie aux vivants. Notre héritage n'est pas que financier. Chacun laisse une trace de son passage, change un peu, de part son empreinte, le monde. Mais en détruisant la dernière demeure, c'est cette dernière trace d'un passage que l'Etat assassine.
Finalement, il me reste Tolstoï : "lexistence de la mort nous oblige soit à renoncer volontairement à la vie, soit à transformer notre vie de manière à lui donner un sens que la mort ne peut lui ravir." Transcender la vie par lart, faire de ses blessures une uvre.Lire aussi les avis sur Roboforex
"Le père Amable avait peur du curé par appréhension de la mort qu'il sentait approcher. Il ne redoutait pas beaucoup le bon Dieu, ni le diable, ni l'enfer, ni le purgatoire, dont il n'avait aucune idée, mais il redoutait le prêtre, qui lui représentait l'enterrement, comme on pourrait redouter les médecins par horreur des maladies." Guy de Maupassant, Le père Amable.
Maintenant, en plus, j'ai peur de ces gens qui n'auront pas trouvé d'autre métier que nettoyeurs de tombes et prendront mes os avec indifférence. Vous qui serez là, quand un maire essayera de reprendre mes quelques derniers centimètres carrés, refusez de me laisser offenser, réifier. Merci...
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Chronique et photos publiées dans : La trahison des morts : les concessions à perpétuité discrètement récupérées (Cahors, à l'ombre des remparts médiévaux, les vieux morts doivent laisser la place aux jeunes...) Plus d'informations (dont achat du livre en papier et numérique). |
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